Nous sommes une poignée d’amis, issus pour la plupart de milieux favorisés, ayant fait de belles études, menant une vie confortable, en résumé nous sommes sociologiquement au coeur de l’électorat Macron. Ainsi, telle la quasi totalité de notre entourage, amis, collègues, camarades de promos, nous aurions dû marcher derrière lui avec entrain. Mais c’est l’inverse qui s’est produit, cette élection et les premiers mois catastrophiques de ce mandat nous ont mobilisés comme jamais auparavant. Il ne nous est plus possible de ronger notre frein dans notre coin, infiltrés silencieux au coeur de la Macronie. Il nous semble nécessaire d’agir et tenter, à notre niveau et avec nos moyens, de contribuer à l’émergence de vraies alternatives.
Notre cheminement politique est divers, nous nous situons aujourd’hui clairement à gauche mais sommes conscients aussi que ce mot a été galvaudé par 40 ans de naufrage de la sociale-démocratie en Europe et du PS en France. Nous nous reconnaissons en tout cas dans la formule de Frédéric Lordon : l’envie de refaire le cadre et non pas juste de trouver des accommodements à l’intérieur. Ainsi, nous jugeons indispensable de remettre en question sans tabou les structures qui conditionnent le fonctionnement de nos sociétés : rôle des marchés financiers, construction européenne, libre-échange, évolution des droits économiques de la personne ou encore régime de propriété des moyens de production. Evidemment ces réflexions ne peuvent être menées sans intégrer l’urgence environnementale et climatique. Mais l’enjeu n’est pas dans ces quelques lignes d’afficher un programme ou de s’affilier à tel ou tel mouvement, il nous semble que beaucoup de questions restent ouvertes, ou en tout cas à travailler.
Politiquement nous n’avons que peu d’expérience militante et n’avons pas l’intention de créer un nouveau parti ni de nous placer dès maintenant en soutien à un parti existant. Nous n’avons pas non plus la prétention d’être source d’un apport théorique déterminant tant beaucoup de choses ont déjà été pensées, dites, écrites ailleurs.
Quel est alors le sens de notre démarche ?
Elle naît d’une conviction, celle que nous ne sommes pas seuls dans ce milieu à vouloir promouvoir un autre modèle de société. Il nous semble qu’on donne toujours la parole aux mêmes patrons, experts, économistes qui nous racontent toujours la même histoire de mesures nécessaires pour fluidifier le marché du travail, de problème de compétitivité, de fuite des investisseurs, de poids de la dette qu’on va laisser à nos enfants. Et pourtant, il est très vraisemblable que dans le bureau d’à côté un autre économiste, ou bien un N-1 du patron, ou encore un banquier repenti, serait aussi pointu dans son domaine mais capable de nous faire entendre un tout autre son de cloche. Ce sont ces personnes, plus discrètes en général parce qu’elles se sentent isolées ou mettent en jeu leur carrière si elles disent ce qu’elles pensent vraiment, que nous voulons rassembler et auxquelles nous souhaitons proposer une tribune. Un des objectifs est effectivement d’essayer d’ébranler ce sentiment d’unanimité des experts, ce dogme du TINA (There Is No Alternative de Thatcher) en montrant qu’une autre politique est possible, crédible et souhaitable.
Une de nos premières initiatives fut de contacter François Ruffin dont nous apprécions les prises de position et la personnalité. Cette rencontre a donné lieu à un article dans le numéro de Fakir de Décembre 2017 “Appel à l’élite Infiltrée” et nous a déjà permis de rallier quelques bonnes volontés. N’hésitez pas à nous contacter en tout cas si vous souhaitez contribuer, apporter votre témoignage, anonyme ou non, ou encore vos compétences ou analyses. Toutes les forces vives sont les bienvenues pour promouvoir une alternative crédible et nous aider à tenir la distance !
10 réponses
C’est certes très bien, mais regrettez-vous François Hollande ?
Je pense que vous n’avez pas compris ce que cet article a voulu dire clairement…
Bonjour
Je suis ce qu’on appelle un senior toujours en activité. Je pense faire partie disons des 10 % du haut. J’ai un gros défaut: je ne suis pas de gauche. Lordon lui-même (que j’apprécie tout comme Ruffin ou Todd) m’a confirmé que c’était grave. J’essaye donc de me soigner mais j’ai peu d’espoir
Bref, votre démarche m’intéresse et je suis plus particulièrement motivé par l’économie, domaine dans lequel j’essaye de créer des lacunes dans mon ignorance depuis maintenant 10 ans.
J’ai milité à gauche (si,si,), à droite (sans faire exprès) et suis maintenant un peu orphelin et frustré en terme d’action. Donc si vous avez des idées ….
A vous lire à l’occassion
J’oubliais: je n’aime pas la modération à priori sur les blogs !!!
Bonjour,
J’aime beaucoup votre démarche. Je comprends votre situation : vous devriez être macroniens, vous êtes des « natural-born macronians », seulement voilà ça ne passe pas. Il ne faut pas que ça se voie. Mais ça pique.
J’en suis au même point, à mon humble échelle, cf https://prototypekblog.wordpress.com/2018/06/26/je-devrais-etre-macronien/
Bonne continuation, avec détermination et discrétion !
Comme le couscous à Noël (sérieuxe, oui). J’adhère à donf.
Restez cachés. L’outing coûte cher >cf Juan Branco…Continuez votre travail de sape de l’interieur. Le plus utile à mon sens…
Si je comprends bien les gens qui fréquentent ce blog attendent leur retraite pour faire leur coming out de peur d’être obligés de renoncer à quelques avantages qu’ils n’auraient pas encore obtenus. Vous risquez ainsi de rater ce moment unique dans la vie d’un cadre dirigeant, lorsque les subordonnés de vos subordonnés découvrent ébahis que vous avez toujours été de LEUR côté et non pas du côté des enfoirés et autres arrivistes en costard cravate qui vendent tous les jours leur âme au diable, lorsque tout le monde ose enfin vous adresser la parole dans les couloirs, même ceux qui, du fond de leur « placard » où ils se sont rabougris à force d’être rendus invisibles, n’auraient jamais osé arrêter votre pas altier quand vous déambuliez de bureau en bureau……Allons , ayez le courage de vos opinions . Osez vous affirmer comme vous êtes. Osez écrire sous votre vrai nom. Seuls ceux qui ont montré un peu du courage peuvent inspirer aux autres le même courage. Le courage est contagieux mais votre couardise fait chaque jour des ravages. Votre entreprise ou votre administration n’a nullement besoin de vos services. Ceux qui sont dans la rue, eux, vous réclament depuis longtemps.
Bonjour
Je pensai être lâche, lorsque je me taisais comme chef d’agence dans le groupe Bouygues en observant la décervelisasion que gérait la DRH lors des élections professionnelles ou il me fallait rameuter le ban et l’arrière ban pour favoriser dans mon agence le syndicat fantôme FO Bouygues.
Enfin je suis heureux de savoir , ne pas avoir été seul dans ce dilemme et avoir eu raison de ne pas plier .
Certes la gauche ,depuis 30ans fut décevante, mais nous avons eu raison , dans notre coin, seul, de croire que la justice sociale n’était pas qu’un mot sans signification.
J’ai aujourd’hui 77 ans, mais je n’ai jamais oublié Mai 68 !!!
Si ça se trouve des ministres de Macron sont, tout comme vous, de gauche, mais, tout comme vous, ils n’osent pas le dire de peur, tout comme vous, de mettre en péril leur belle carrière.