Coronavirus : le gouvernement devra rendre compte de son inconséquence

« Le savoir afin de prévoir, et prévoir afin de pourvoir », Le rivage des Syrtes, J. Gracq

« Je félicite toutes celles et ceux qui avaient prévu tous les éléments de la crise une fois qu’elle a eu lieu », Emmanuel Macron, 20 mars 2020.

« Lisez ! » nous a enjoint le 16 mars 2020 le Président Macron en s’improvisant chef de « guerre » contre un ennemi invisible (au passage, il y aurait à redire sur cette injonction, si manifestement corrélée à l’habitus privilégié de qui peut décider de profiter du confinement pour le détourner en épanouissement personnel). Alors j’ai lu. Quoi ? Pas mal d’articles (ici ou ) et ce fabuleux petit livre : Le nouveau rapport de la CIA : comment sera le monde de demain ? paru chez Pocket, en… 2006. Je vous en recommande la lecture. Le Figaro s’en fait aussi l’écho.

Et que nous apprend-il ce livre ? Comment pourrait être le monde de demain. Je cite un chapitre intitulé « Le déclenchement possible d’une pandémie mondiale ». J’y lis, puisqu’on m’a dit de lire : « L’apparition d’une nouvelle maladie respiratoire humaine virulente, extrêmement contagieuse, pour laquelle il n’existe pas de traitement adéquat, pourrait déclencher une pandémie mondiale. Si une telle maladie apparaît, d’ici à 2025, […] les nations s’efforceront alors – avec des capacités insuffisantes – de contrôler les mouvements des populations […]. » Le chapitre poursuit par l’identification de souches pouvant déclencher ce fléau en citant la grippe aviaire, le coronavirus du SRAS – oui, vous avez bien lu : le coronavirus –, et diverses souches de la grippe.

Je poursuis ma lecture : « Si une maladie pandémique se déclare, ce sera sans doute dans une zone à forte densité de population, de grande proximité entre humains et animaux, comme il en existe en Chine […] ». Avant de conclure sur l’absence de vaccin, la contagion mondiale, les milliers de morts. Evidemment, il est toujours plus aisé de sélectionner a posteriori, une fois les événements advenus, les anciennes prévisions qui se sont avérées exactes. Mais il est pour autant surprenant de trouver dans un écrit datant de plus de 15 ans, à partir d’analyses de services gouvernementaux états-uniens, une prévision qui s’avère aussi exacte, non seulement sur l’apparition du phénomène, mais encore sur ses conditions d’apparition, et sur ses conséquences.

J’ai lu et je dis : gouverner c’est prévoir

Le scénario actuel était donc écrit. De longue date. En 2006. Et plus près de nous, en 2018, l’OMS elle aussi alertait les gouvernements sur ce risque. Et, malgré ce scénario catastrophe, que les plus hautes autorités, que les experts, que les scientifiques, que les gouvernements ne pouvaient donc ignorer, les gouvernements successifs ont détruit, mis à genoux, démoli l’hôpital public et asphyxié la recherche, faisant fi de notre capacité d’anticipation. Les chercheurs le disent : la recherche ne peut se faire sur commande, dans l’urgence. Il faut des financements au long cours, sans appel projet, pour prévenir les risques majeurs qui menacent nos sociétés.

Au lieu d’anticiper une crise sanitaire, la France a commandé ces derniers mois des LBD, mais pas de masques, des grenades de désencerclement, mais pas de tests de dépistage, des drones de surveillance, mais pas de solutions hydro-alcooliques, qui font défaut pour sauver, contenir l’épidémie, malgré ce qu’en dit le gouverne-ment. J’ai lu. Et je vous dis, dirigeants occidentaux cupides et successifs, que vous aurez des comptes à nous rendre. Parce que l’anticipation aurait dû prévaloir.

Et dans la période la plus récente, la gestion de la crise, dont l’ex ministre de la santé Agnès Buzyn déclare avoir été consciente dès janvier, est calamiteuse. C’est malgré son alerte ce mois-là que n’ont pas été commandés les masques, les gants et les gels hydro-alcooliques ou encore les tests, que la 7e puissance mondiale – la France – aurait dû avoir. Même nos soignants en manquent. Nos soignants que la police gazait il y a peu lorsque dans les manifestation ils dénonçaient le délabrement et le manque de moyens de nos hôpitaux qui ne pourraient absorber une simple grippe saisonnière. « Rien que sur les treize dernières années, entre 2003 et 2016, 13 % des lits d’hospitalisation à temps plein (c’est-à-dire accueillant des patients plus de 24h) ont été supprimés, soit 64 000 [69 000 lits d’hospitalisation complète entre 2003 et 2017, comme le rappelle ce papier de LCI, ndlr], alors que, parallèlement, les besoins de santé de la population n’ont fait qu’augmenter. » déclare la sociologue Fanny Vincent aux Inrocks le 18 mars dernier. Mais il y aurait trop à dire sur la casse de l’hôpital public depuis les 4172 lits en hospitalisation complète qui ont été supprimés en 2018, depuis la suppression de 22 000 postes de soignants sur 3 ans par le plan Touraine en 2015 ou même avant.

Chers gouvernants, vous aurez donc des comptes à nous rendre. Quand nous compterons nos morts (dont un médecin hospitalier à l’heure où j’écris), aurez-vous du sang sur les mains ?

J’ai lu, je lis et je tremble.

 

 

2 réponses

  1. Foulquier dit :

    J espere de toutes mes forces qu ils nous rendront des comptes.
    Que nous ferons ce qu il faut pour les y contraindre, et qu ils seront obligés de laisser la place.

  2. marie dit :

    c’est pas le moment de faire des billets d’humeur c’est le moment de chercher à être utile, vas sur twitter et réponds moi.

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